Que BAT, comme Juul et PM, veut vendre les nouveaux produits uniquement aux fumeurs adultes, ne peut pas être une intention honnête. Car sans le recrutement de nouveaux dépendants de la nicotine, ce modèle commercial verra son marché s’assécher d’ici une génération. L’offre de cigarettes électroniques doit donc séduire la génération de nouveaux fumeurs, soit les jeunes. Et en effet, Larsen veut «gagner des parts de marché de nos concurrents. Ceci n’est pas possible sans publicité». Le soi-disant autocontrôle de la publicité, censé empêcher la consommation de tabac parmi les jeunes, est une farce: Swiss Cigarette (c.-à-d. PM, BAT et Japan Tobacco international, JTI) s’est accordé en 2005 avec la «commission de loyauté» (CL) pour que celle-ci se charge de juger les infractions au code d’honneur. Contrairement aux plaintes d’autres domaines, le règlement de la CL prévoit que les infractions commises par l’industrie du tabac ne seraient pas sanctionnées, mais transmises en tant que recommandations à … Swiss Cigarette [3]! Rien d’étonnant donc que Larsen refuse l’initiative populaire «Oui pour la protection des enfants et des jeunes contre la publicité pour le tabac». Car «presque la moitié des dépenses publicitaires de BAT vont actuellement vers les nouveaux produits. Par ailleurs: Quid de l’alcool, du gras et du sucre, qui peuvent également nuire à la santé? En toute conséquence, la publicité pour ces aliments devrait également être interdite.» Utilisé par l’USAM, les publicitaires et l’UDC [4], ce vocabulaire est désormais monnaie courante depuis le siècle dernier. La preuve dans un document interne de R. Reynolds Tobacco (racheté par JTI) datant de 1993, qui taisait que la nocivité du tabac provenait du grand pouvoir addictif de la nicotine auprès des jeunes [5]. L’ambivalence du citoyen responsable Larsen et du CEO de BAT apparaît lorsqu’il commente l’affirmation classique de sa branche selon laquelle le tabac serait un produit de plaisir comme un autre: «La nicotine a un pouvoir addictif élevé, c’est pourquoi une consommation modérée – contrairement au verre de rouge – est problématique à moyen et à long terme.» Il entonne néanmoins le refrain connu: «L’Etat ne peut influencer le comportement des consommateurs que de manière limitée. En France, notre branche n’est pas du tout autorisée à faire de la publicité, et pourtant, là-bas, beaucoup plus de personnes fument qu’en Suisse.» Mais il tait le fait que les chiffres officiels sous-estiment, depuis longtemps et de manière flagrante, la prévalence des fumeurs en Suisse [6].