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Combler les lacunes dans la prise en charge

Actualités
Édition
2024/05
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2024.1317709252
Bull Med Suisses. 2024;105(05):8-9

Publié le 31.01.2024

Cancer
Le 4 février prochain se tiendra la Journée mondiale contre le cancer. Elle sera dédiée aux lacunes dans la prise en charge et aux inégalités d’accès aux soins médicaux en lien avec le cancer. Ces problématiques ne touchent pas seulement les pays à revenus faibles; la Suisse est également concernée.
Un «Care Gap» dans la prise en charge du cancer touche aussi la Suisse.
© Matteo Vistocco / Unsplash
Pour la troisième année consécutive, l’Union for International Cancer Control (UICC) consacre la Journée mondiale contre le cancer au thème du « Care Gap » [1]. L’objectif est d’attirer l’attention sur les lacunes et les inégalités dans l’accès aux soins anticancéreux.
Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), les plus fortes disparités en matière d’accès aux soins sont observées entre les pays à revenus faibles et les pays à revenus élevés. Ainsi, un traitement complet serait disponible dans plus de 90% des pays à revenus élevés, mais dans moins de 15% des pays à revenus faibles [2].

Le taux de survie des enfants atteints de cancer est supérieur à 80% dans les pays à revenus élevés, tandis qu’il n’atteint parfois que 20% dans les pays à revenus faibles.

Comme l’indique l’UICC, le taux de survie des enfants atteints de cancer est supérieur à 80% dans les pays à revenus élevés, contre parfois seulement 20% dans les pays à revenus faibles. Outre les ressources d’un pays, on observe également des facteurs d’influence au niveau individuel, à savoir notamment le revenu, le niveau d’éducation et le lieu de résidence [3]. Parallèlement, les groupes les plus défavorisés seraient également plus exposés à des facteurs de risque tels que le tabac, une mauvaise alimentation et les effets néfastes de l’environnement sur la santé.

Des inégalités aussi en Suisse

De telles inégalités existent aussi en Suisse. Dans le cadre du projet PNR-74 «Inégalités sociales dans les soins stationnaires en Suisse», un groupe de recherche a montré, en prenant l’exemple du cancer de l’intestin, que la durée d’hospitalisation des patients ayant un faible niveau de formation scolaire était plus longue que celle des personnes ayant un niveau plus élevé [4]. Cela laisse supposer que les personnes à faible niveau de formation ont moins souvent recours à une coloscopie. Conséquence: le cancer leur est diagnostiqué plus tard. Le même effet a été observé chez les personnes ne disposant pas d’une assurance maladie semi-privée ou privée [5].
«Le fait d’avoir des ressources financières plus importantes et une meilleure assurance facilite sans doute l’accès à la prévention et au dépistage. À cela s’ajoutent un diagnostic plus précoce, un traitement moins invasif et donc une sortie plus rapide de l’hôpital», explique Lucy Bayer-Oglesby, docteure en sciences naturelles, collaboratrice scientifique à l’Institut de travail social et de santé de la Haute école spécialisée du Nord-Ouest de la Suisse et membre du groupe de recherche.
Outre les inégalités sociales, il existe également des lacunes dans la prise en charge médicale du cancer. L’étude SCAPE – Swiss Cancer Patient Experiences – se penche sur ces questions. L’enquête menée auprès de personnes atteintes de cancer montre que celles-ci attribuent de bonnes notes aux soins et à la prise en charge à l’hôpital. Elles considèrent toutefois que l’information au moment du diagnostic, le soutien en rapport avec les effets secondaires du traitement ainsi que l’aide psychosociale et financière pourraient être améliorés [6].

Les chercheurs insistent régulièrement sur la nécessité de prendre davantage en compte les aspects sociaux dans le système de santé.

Suivi coordonné

À l’occasion de la Journée mondiale contre le cancer 2024, l’UICC souhaite inciter les dirigeants politiques à agir afin de réduire de telles disparités et le «Care Gap».
Pour la Suisse, la Ligue suisse contre le cancer demande notamment des soins médicaux et des programmes de dépistage systématique du cancer de l’intestin, du sein et du poumon dans tous les cantons, et ce, indépendamment du lieu de résidence. En même temps, il s’avère nécessaire d’assurer un accès équitable aux médicaments innovants sans modèles de prix opaques, une offre de suivi coordonnée pour les quelque 450 000 Cancer Survivors en Suisse et une base légale pour uniformiser et financer les soins palliatifs, comme le souligne la Ligue suisse contre le cancer [7].
Les chercheurs insistent en outre régulièrement, en conclusion de leurs études, sur la nécessité de prendre davantage en compte les aspects sociaux dans le système de santé. «Lors de l’admission à l’hôpital, par exemple, il serait judicieux de procéder à une évaluation de la situation sociale du patient. Enfin, les tarifs des caisses-maladie devraient aussi permettre un travail social professionnel dans le système de santé, tant en ambulatoire qu’en stationnaire», déclare Lucy Bayer-Oglesby.